samedi 21 juin 2025
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Les Cadeaux De Noël D'Arcade Fire
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L'impasse du caillou (a.k.a. La Route du Rock) / Edition 2004

Ah! La Bretagne, quelle région magnifique. Sa féérie, ses légendes, sa magie. Et en plus un festival à la mesure de son nom. Décidément les bretons nous surprendrons
toujours. Une route et une seul, celle du rock.

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Saint-Père, forteresse musicale qui ne s’est jamais rendue, se laisse pourtant prendre chaque année d’assaut par des festivaliers aux t-shirts Sonic Youth, Fubu, et Décathlon. Ce rendez-vous « indé » propose depuis 14 ans un chariot d’artistes alléchant, à quelques encablures de Saint-Malo. Au village, un adage fait rage : « De Saint-Malo tu ne seras malouin, lorsque de bouillasse ta caisse sera maculée ». Vérification faite, nous y sommes.

C’est le vendredi 13, et miracle - peut être est-ce à cause de la visite du Saint Père en France, les capotes se rétractent : pas de seaux d’eau ce soir!. La cocarde au poignet, il est déjà grand temps de pénétrer notre mobile-home flambant neuf qui s’apparente finalement à une tente de base, bien que moulée Igloo. La découverte de nos voisins de 3 jours nous laisse le cul entre deux chaises de camping. Collègues, cracheurs de feu, collégiens acnéiques, arachnides et sauterelles royales, beaux petits lots, vendeurs de « bédo-man-ça gère ? » , zicos… les douves abritent une faune bien diverse ! Cet Anglais qui passait par là nous a justement servi de défouloir. Avec le recul, le rosbeef eût été meilleur dans nos assiettes... On se ra-bat illico presto sur des pâtes au pesto, mais moins bien qu’au resto. A court d’idées, nous buvons. Le sommelier nous dégôte une puissante liqueur qui décuple la portée de nos vannes, à l’aine.

Il est 19h30, nous nous apercevons, groggy, que Now It’s Overhead est en train de nous passer au dessus de la tête. Autant ne pas bouger d’un iota et patienter jusqu’au baroud d’honneur de The Beta Band, très attendu, mais finalement pas vu. On se saura jamais si les Ecossais ont fait mieux que lors de leur tournée d’il y a deux ans. Les beuglements « Rock’n’Roll ! » des brillants lourdeaux environnants nous décident à prendre nos cliques et à mettre des claques. L’ambiance sur le chemin de la scène nous rappelle fortement l’édition 1972 de la RDR, à l’époque où le camping était encore à Dinard. La nuit tombe, et l’on trinque à la générosité des bénévoles. The Kills ouvrent le feu et mettent tout le monde d’accord pour un pogo endiablé, même si la dédicace à Florence Ré (pas de l’ile), n’est pas des plus malouines. Il est déjà 23h30, Deus sort ses guitares des housses, débarque, balance la purée, et nous la mayonnaise sur les frites. C’est the ideal krash’up. LCD Soundsystem est la grosse révélation de l’édition, et on l’apprécie autant sous LSD qu’à jeûn, notamment pour les pruneaux dénoyautés par le batteur. Ce n’est pas lui, mais bien Murphy, qui permet au groupe d’être estampillé label DFA. Dernière étoile de la soirée, RJD2 fait chou-bacca-blanc malgré quelques jolis han solos de scratch. La musique au Fort, c’est fini pour ce soir, mais la fête continue au camping 4 étoiles. Cependant, l’after des douves n’est pas du goût de tous : aux traditionnels « Rock’nRoll !» font désormais écho des « Ferme ta gueule connard ! » de circonstance. En dépit de leur protestation, les commandants couche-tôt rendent les armes, assiégés par les brigades du cidre. La nuit sera courte pour tout le monde.

Le soleil à son zénith nous chasse des tentes et précipite notre sudation. Une fois douchés et délestés de nos black dice, direction la Plage et les «Siestes Musicales». La navette se fait attendre… Tombés à genoux et les mains jointes, nous essayons, en vain, mais pas en van, de susciter la pitié automobile. Là bas, confirmation du succès de la formule : les festivaliers dessaoûlent sous le soleil, enivrés cette fois par la musique. Quelques filles motivées se trémoussent sur du son maousse et house. Nouvelle Vague déferle sur la plage de l’Eventail et propose un petit rafraîchissement à base de reprises bossa nova du meilleur effet. La chanteuse Camille, prise d’une soudaine envie d’uriner, se précipite dans l’océan : une première ! Gravenhurst n’est pas resté gravé dans nos mémoires, mais c’est pas grave, le concert a eu le chic de prolonger notre coma mélodique en cette fin d’après-midi.

Retour au beau Fort où le temps nous est compté : une fois de plus, nous ratons le coche en entendant ricocher sur les remparts les premières
notes de Flotation Toy Warning et ses compos planantes. Mais ces grands dadais prometteurs n’atteignent pas encore le niveau d’émotion et de grâce de Grandaddy, leurs maîtres spirituels. Puis, c’est au tour de Lali Puna de se frotter à la scène. Leur prestation s’avère aussi rafraîchissante qu’un bouquet de lilas cueillis au sommet de l’Anapurna. L’horloge indique 22h et l’aliment manque, problème vite résolu. En effet, un de nos bénévoles préférés, Hugues, offrait des gaufres aux fraises aux frais de l’organisation. Pas le temps de tergiverser que déjà, devant la scène, les corps se ressèrent avec l’appel d’Air, certainement le groupe le plus attendu du week end. Les Versaillais nous envoûtent, et nous invitent à leur safari musical. Herpèz lourd ce soir. L’assistance n’en est pas moins immédiatement contaminée. Pas de doute : le ministère aime Air. Puis Phoenix fait nique à ses détracteurs en se révélant être une veritable moissonneuse-batteuse de tubes. Mais le public est abasourdi, et tabassé à base de basses trop fortes. Réglages de fréquence oblige pour les nouvelles stars, Tv on the Radio et Peaches, qui nous font passer une sacrée (seconde partie de) soirée. La prestation des premiers, bien qu’en noir et blanc, se révèlera haute en couleurs. Finalement un peu déçus, on rejoint Flavor Flav qui avait sans doute raison : « Don’t believe the hype ! ». Pour la Canadienne, le voyage en « classe aisselles » (non climatisée) qu’elle nous propose, sera plutôt à dominante rose. En effet, elle prend la pose, défend sa cause, et ose un final en apothéose. Grands amateurs d’astronomie, l’apparition de trous noirs nous empêche malheureusement de nous souvenir de cette nébuleuse fin de soirée. On se jure alors d’être plus studieux demain, dimanche, et de privilégier l’aspect « musique » du festival.

Le Dieu Soleil prend décidément un malin plaisir à transformer notre igloo en sauna dès l’aube. Arrachés des bras de Morphée, amorphes et morfales, les traits tirés comme dans un morphing, nous sommes toutefois ravis d’être à la Route du Rock. Ce dernier jour s’annonce excellent, et toujours pas de pluie, c’est Broadway ! Pas de pépin pour Mojave 3, qui épluche très délicatement nos sentiments et récolte les fruits de son travail. Du jus, il y en aura plein après, mais Mojave, l’eau, rien à foutre ! Girls in Hawaii décroche le cocotier en surfant sur les premières flaques de boue, sans effectuer pour autant moult acrobaties. Du jus, des jumeaux et pas de grumeau : l’Amédéo du soir prévoit des éclairs sonores et un déluge d’émotions sur toutes les têtes. Au Kazu vous ne l’auriez pas compris, Blonde Redhead se jette à l’eau sous une trombe d’applaudissements. A ce moment là, le Fort entier prie le Saint Père pour que la pluie le laisse en paix. On pense alors que les coups de tonnerre ne peuvent rien face à la magie créée par ces 3 artistes, mais c’est sous-estimer le climat breton, qui ne laisse de choix à personne : après 25 minutes d’un concert si entraînant, les organisateurs décident d’y mettre fin, et tout le monde reste sur sa faim. Misery is a waterfall ! Pendant une heure, le contraste est fort entre la régie qui s’affole, et les spectateurs qui s’affaissent. Enfin, retour à la musique ! Ce n’est pas Dionysos le dieu de la soirée mais bien Poséidon, malgré le plongeon de Mathias dans la houle. Véritable groupe waterproof, ils ont fait mentir leurs textes en évitant l’électrocution. Clinquant la première fois, le show des Valentinois peut vite s’avérer lassant dès la deuxième. Faites maintenant exploser vos blouses pour Jon Spencer car l’orage est passé dans les cieux… mais pas devant nos yeux, car entre le Blues Explosion et son public, c’est le coup de foudre assuré. Le trio new-yorkais dévoile quelques titres de son prochain album, Damage. Ce soir, Jon Spencer a opté pour une coupe de cheveux « jeune premier » avec son gel effet mouillé, mais on ne se laisse pas avoir, et on comprend de suite pourquoi le groupe jouit d’une aussi belle réputation depuis tant d’années. Russel Simins, batteur rare et massif, nous fait profiter de sa technique et de son tempo irréprochables, ainsi que de ses gifles cuisantes, qui réchauffent l’atmosphère. Judah Bauer, efficace et impeccable à la guitare, se déhanche toujours de manière aussi plaisante. La formation marseillaise qui suit n’aura pas autant de succès. Pas trop de bol, mes coeurs, car la police a réussi à menotter ces fauteurs de trouble, trop chiants et anachroniques pour l’heure avancée et leur avancée. Les Troublemakers passent donc la fin de soirée dans la fourgonnette, et nous, des souvenirs plein la tête.

Arthur, Olivier & Olivier. Ecrire à GRR@ougl.net pour toute publication.


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